COMMUNIQUE: Gestion des fonds Covid19: L’urgence ne justifie pas tout

COMMUNIQUE: Gestion des fonds Covid19: L’urgence ne justifie pas tout
COMMUNIQUE: Gestion des fonds Covid19: L’urgence ne justifie pas tout

Rappel des faits : Le ministère de la Justice a publié sur sa page Facebook le rapport d’audit de la Cour des Comptes sur les flux financiers liés à la lutte contre la pandémie COVID19, le vendredi 18 février 2022. Cette publication fait suite à une audience de la Cour des comptes le mercredi 16 février et une notification du ministère de la Justice sur la finalisation de quatre (04) rapports d’audit menés par ladite juridiction financière.

Nous, organisations de la société civile, signataires de ce communiqué, tenons à féliciter la Cour des Comptes pour la qualité du rapport et l’effort d’indépendance entrepris. La publication dudit rapport est une percée dans la promotion de la transparence et de la redevabilité à Madagascar.

Toutefois, il est utile de rappeler au public que ce rapport ne constitue qu’un élément parmi les quatre rapports d’audits élaborés par la Cour des Comptes, s’agissant notamment des audits organisationnels, des flux financiers, des mesures d’accompagnement des programmes sociaux, et des marchés publics. Le contenu du premier rapport est satisfaisant mais le travail engagé par la Cour des Comptes ne saurait être considéré comme complet sans la publication impérative des trois autres rapports prévus initialement.

Nos constats : Malgré la qualité du rapport, nous tenons à déplorer le non-respect du principe de séparation des pouvoirs. Il aurait été plus judicieux de laisser à la Cour des comptes la latitude de la publication de l’intégralité des rapports.

Le premier rapport de la Cour des comptes a pointé du doigts un certain nombre d’anomalies. Ledit rapport met en lumière cinq (05) principaux constats, à savoir :
Constat 1 : Le cadre légal de la gestion des finances publiques n’est pas adapté pour gérer une urgence comme la pandémie COVID19. Les premières réformes institutionnelles telles que la mise en place du CCO, de la cellule de crise, de la Task Force, souvent sans base légale, ont conduit à une confusion des responsabilités en matières budgétaire et financière.
Constat 2 : Force est d’admettre que des abus ont été perpétrés à l’exemple des recours excessifs aux paiements en espèces, l’absence et l’insuffisance de pièces justificatives, la gestion de fait ou encore l’immixtion des acteurs non habilités, les paiements indus, et les paiements sans vérification de l’effectivité des travaux/prestations.
Constat 3 : La gestion de la lutte contre la COVID19 fait état d’une mauvaise gouvernance. Malgré l’existence des fonds mis à disposition par les contributions nationales, et le financement Catastrophe Defered Drawndown (Cat DDO jusqu’ici non utilisés), mais également des deux (02) régies d’avances, la Présidence et la TASK FORCE ont avancé certaines dépenses par le biais d’un compte de provision au niveau de la Présidence, sans qu’il y ait certification de services faits.
Constat 4 : L’utilisation finale des financements laisse paraitre une appréciation très discutable des priorités. L’appui au secteur privé reste limité aux prestataires de la JIRAMA.
Constat 5 : Les informations liées à la fabrication du CVO demeurent opaques alors que cette activité a été priorisée dans le processus budgétaire.

L’urgence de la situation est régulièrement évoquée dans les réponses apportées par la Présidence aux points soulevés par la Cour des Comptes. Si des prises de décision et des actions rapides ont en effet été attendues par la population de la part de l’Exécutif, ceci ne saurait justifier une gestion illégale et non scrupuleuse de l’argent public.

L ’opérationnalisation du comité de pilotage du PMDU, maintes fois réclamée par les OSC, aurait permis de limiter les dérives observées, notamment avec l’identification de façon concertée des priorités. Elle aurait également pu permettre de mettre à profit de façon encadrée les fonds non utilisés au sein du fonds de riposte COVID19.

Nos recommandations

De tout ce qui précède, nous exigeons :
● La publication sans retouches des trois autres rapports d’audit de la Cour des Comptes.
● L’adoption d’une loi organique et non ordinaire actualisant la loi 91-011 du 18 juillet 1991 relative aux situations d’exception , accompagnée d’une série de réformes des textes légaux et réglementaires venant compléter et couvrir les aspects de l’urgence sanitaire, surtout en matière d’exécution des dépenses publiques .
● La prise de responsabilité et la coordination des Organes de Contrôles des Finances Publiques (OCFP) et des juridictions compétentes autour des anomalies identifiées par la Cour des Comptes afin que toutes les infractions soient sanctionnées à la mesure des attentes des citoyens.
● Une meilleure implication des acteurs à travers le comité de pilotage du PMDU pour opérationnaliser les fonds de riposte COVID19.
● Plus de transparence autour de la fabrication du CVO et le bilan financier des entreprises impliquées dans sa fabrication ;
● L’application sans réserve des dispositions du décret portant création du fonds de riposte COVID19.

Nous demandons aux partenaires techniques et financiers de soutenir ces exigences afin de marquer leur attachement à l’Etat de droit, à la bonne gouvernance et à la défense de l’intérêt général à Madagascar.

Antananarivo, le 22 février 2022

OSC signataires :
– AVG
– CCOC
– Mouvement Rohy
– MSIS Tatao
– OIMP
– ONG Hitsy
– ONG Ivorary
– ONG Ravintsara
– ONG Tolotsoa
– Transparency International – Initiative Madagascar (TI MG)
– ONG SAHA

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