À Madagascar, près milliers d’enfants sont privés de leur enfance, contraints de renoncer à leurs rêves dès leur plus jeune âge et faire face à la dure réalité du travail et d’exploitation. Près de la moitié des enfants âgés de 5 à 17 ans sont touchés par ce phénomène selon une enquête de l’Institut National de la Statistique réalisée dans le cadre du programme mondial MICS en 2018. Ce problème affecte davantage les garçons que les filles, ainsi que les enfants vivant en milieu rural par rapport à ceux en milieu urbain, et les enfants issus de familles défavorisées. Les enfants qui ne fréquentent pas l’école sont particulièrement vulnérables, avec plus de la moitié d’entre eux impliqués dans le travail des enfants. Les chiffres montrent également que les enfants commencent à travailler à un très jeune âge, avec 36% des enfants âgés de 5 à 11 ans déjà engagés dans le travail.
La première cause du travail des enfants à Madagascar est la nécessité de subvenir aux besoins de la famille, une motivation majeure où les enfants se voient souvent contraints de travailler pour contribuer aux revenus familiaux. En outre, la pauvreté est un facteur prépondérant, poussant les familles à utiliser les enfants comme mains- d’œuvre pour aider à compenser les difficultés financières. En outre, la gratuité des frais de scolarité dans les établissements scolaires publics est loin d’être effective et reste un défi à relever. En plus des frais de scolarité, les parents d’élèves doivent souvent contribuer au paiement des salaires des « maîtres FRAM ».
Cadre juridique : Madagascar, ayant ratifié les Conventions 138 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) le 19 juin 1976, s’engage à réglementer le travail des enfants en fixant un âge minimum de 15 ans, avec des exceptions pour les travaux légers à partir de 13 ans. De plus, le pays a démontré son engagement à interdire, éliminer et protéger les enfants de moins de 18 ans des pires formes de travail, incluant l’esclavage, en prenant des mesures immédiates conformément à la Convention N° 182 de l’OIT.
Conformément à la législation malgache, précisée dans l’article 100 du décret n° 2007-563 du 03 juillet 2007, en accord avec la loi n° 2003-044 28 du Code du travail, l’âge minimum d’admission à l’emploi est fixé à 15 ans. De plus, les enfants mineurs et apprentis âgés de moins de 18 ans ne peuvent être employés à un travail effectif de plus de huit heures par jour et de quarante heures par semaine, avec une interdiction totale du travail de nuit. Les pires formes de travail des enfants sont définies par l’article 10 du DÉCRET N°2018-009 relatif au travail des enfants, incluant entre autres les travaux dans les mines et les carrières, l’exploitation sexuelle à des fins commerciales, le travail domestique dangereux et abusif, ainsi que les travaux dangereux ou insalubres en milieu urbain et rural. Les infractions à ces dispositions sont passibles de sanctions pénales prévues par le Code Pénal, notamment les articles 332 à 347 qui établissent des peines sévères contre le viol, le proxénétisme et toute forme d’exploitation sexuelle des enfants, visant à protéger les droits des mineurs et à punir rigoureusement les auteurs de ces crimes, , démontrant l’engagement du gouvernement malgache à protéger les droits des enfants et à lutter contre le travail des enfants.
Les actions gouvernementales : L’adoption récente de la loi n°2022-018 portant orientation générale du système éducatif à Madagascar marque une avancée significative à la fois dans le domaine de l’éducation et dans la lutte contre le travail des enfants. Cette loi met en avant des dispositions cruciales visant à promouvoir un enseignement primaire public gratuit et obligatoire de 10 ans, ainsi qu’à garantir l’accès de tous à l’éducation.
L’article 15 de cette loi souligne l’engagement de l’État Malgache en faveur d’un enseignement primaire gratuit et obligatoire dans le secteur public de l’éducation, visant à assurer l’accès à tous les citoyens, quel que soit leur contexte socio-économique. De plus, la loi dispose que l’enseignement primaire est obligatoire à partir de l’âge de cinq ans, soulignant ainsi l’importance d’une scolarisation précoce pour le développement global des enfants.
Une autre réforme importante concerne la modification du parcours scolaire, avec le déplacement du certificat d’études primaires (CEP) à la fin de la classe de 6ème et la réduction de la durée du premier cycle du secondaire à trois ans. Cette réforme vise à prolonger le cycle préscolaire et primaire pour mieux préparer les élèves à leur avenir professionnel, entendant également obligatoire l’enseignement jusqu’à la dixième année, sanctionné par un Brevet d’études du premier cycle (BEPC). Concernant la lutte contre le travail –des enfants, le gouvernement a mis en place des politiques telles que le Plan d’Action National sur la traite des personnes, lancé officiellement en décembre 2022. Toutefois, des lacunes politiques subsistent, notamment l’absence d’une politique nationale couvrant toutes les pires formes de travail des enfants. Il reste donc des défis à relever pour garantir une protection complète de l’enfance contre l’exploitation l’aborale.
Recommandations : Adoption d’une politique nationale complète : Il est crucial d’élaborer une politique nationale spécifique pour lutter contre le travail des enfants, en tenant compte de toutes ses formes, y compris les pires. Cette politique devrait impliquer une collaboration étroite avec les parties prenantes concernées, telles que les organismes gouvernementaux, les organisations de la société civile et les représentants des travailleurs et des employeurs. Elle devrait également être en conformité avec les conventions internationale pertinentes, telles que la Convention 182 de l’OIT. Cette politique nationale permettra de coordonner les efforts et de mettre en œuvre des stratégies efficaces pour prévenir, détecter et éliminer le travail des enfants dans toutes ses formes. Transparence et surveillance accrues : Il est essentiel de garantir une transparence totale concernant l’application de la loi sur le travail des enfants. Cela comprend la publication régulière d’informations détaillées sur les activités d’inspection du travail, les infractions constatées, les sanctions imposées et collectées. Cette transparence facilitera le suivi des progrès réalisés dans la lutte contre le travail des enfants, permettant ainsi d’identifier les lacunes et de renforcer la responsabilité des autorités compétentes. Un suivi régulier et une évaluation des mesures prises seront également essentiels pour ajuster les politiques et les actions en fonction des besoins et des réalités sur le terrain.
Renforcement des mécanismes de soutien familial : En plus des efforts visant à éliminer le travail des enfants, il est crucial de renforcer les mécanismes de soutien familial pour réduire la pression économique qui pousse les enfants à travailler. Cela pourrait inclure des programmes de soutien financier aux familles défavorisées, des services d’éducation financière et des initiatives visant à améliorer l’accès des adultes à des emplois décents et rémunérateurs. En investissant dans le bien-être économique des familles, on peut réduire la dépendance des enfants au travail et garantir leur accès à une éducation de qualité.